18 Avr Le Priorat : croissance maîtrisée
Entretien avec Sara Fernàndez, responsable du tourisme à Priorat Enoturisme, dans l’émission La Comarcal sur Canal Reus
Dans cette interview diffusée par Canal Reus dans l’émission La Comarcal, le journaliste Marc Càmara s’entretient avec Sara Fernàndez, responsable du tourisme de l’Association Priorat Enoturisme. Elle y analyse les prévisions pour Pâques et l’été dans le Priorat, le profil des visiteurs, les enjeux de durabilité, ainsi que les nouvelles opportunités comme l’astrotourisme ou la Foire du Vin de Falset. Elle partage aussi sa réflexion sur la manière de gérer la croissance touristique sans perdre l’essence d’un territoire fondé sur la qualité, le paysage et l’accueil humain.
(Source : interview complète disponible sur Canal Reus TV – YouTube)
Avec l’arrivée de Pâques, nombreux sont ceux qui commencent à penser aux escapades et aux vacances, et ils sont de plus en plus nombreux à chercher des alternatives au littoral, en se tournant vers le tourisme intérieur. L’une des destinations qui connaît un véritable engouement est le Priorat, une région offrant une combinaison unique de paysages, de gastronomie, de vins de haute qualité et d’activités de plein air. Mais au-delà de son attrait, le grand défi auquel elle est confrontée est de croître de manière durable, tout en préservant l’identité et la qualité qui font son charme. Parlons-en.
Un week-end de Pâques prometteur
Sara Fernàndez, technicienne du tourisme, est catégorique : les prévisions de fréquentation pour ce week-end de Pâques sont très positives. Avec de nombreux hébergements ruraux complets et d’autres avoisinant les 80 % d’occupation, le Priorat confirme sa position de destination privilégiée pour les voyageurs en quête de nature, de tranquillité et d’expériences authentiques, loin des foules.
Même si la pluie peut modifier les plans, elle est la bienvenue dans la région. « S’il ne pleut pas, il n’y aura pas de paysage », dit Fernàndez, soulignant que le tourisme dans le Priorat va bien au-delà des activités de plein air : on peut aussi y profiter de visites de caves, de dégustations d’huile d’olive ou de balades culturelles.
Quel type de visiteur vient au Priorat ?
À Pâques, le visiteur type est national, principalement catalan, et découvre souvent la région pour la première fois. C’est un public que Fernàndez qualifie « d’explorateur » : quelqu’un qui vient sans savoir exactement ce qu’il va trouver, mais avec l’envie d’aventure et d’authenticité.
Le reste de l’année, le profil change : les visiteurs sont majoritairement internationaux, notamment des États-Unis et du nord de l’Europe. Le public asiatique commence également à arriver. La plupart sont attirés par le vin, mais finissent séduits par la nature, la paix et la beauté du Priorat. L’un des grands atouts hors saison est l’escalade : des zones comme Siurana ou le Parc naturel du Montsant sont des références mondiales pour les grimpeurs, qui y séjournent souvent plusieurs semaines, voire des mois.
Diversification de l’offre : de l’hébergement rural au luxe
Traditionnellement, le Priorat était une terre de refuges, de gîtes ruraux et de petits hôtels familiaux. Mais ces dernières années, des établissements haut de gamme proposant des expériences de luxe ont vu le jour. Cette diversification, selon Fernàndez, ne change pas vraiment le profil géographique du visiteur, mais plutôt ses attentes.
Ceux qui choisissent des établissements plus sophistiqués recherchent du confort, des services personnalisés et moins d’improvisation. Pourtant, la force du Priorat reste l’accueil chaleureux et personnalisé que proposent de nombreux petits hébergements et producteurs locaux. « Cet effet de surprise, ce petit geste fait avec soin, ça n’a pas de prix », souligne-t-elle.
Le rôle des influenceurs et de la diffusion médiatique
Quand une personnalité publique ou un influenceur visite la région et partage son expérience sur les réseaux sociaux, l’impact est notable. Mais cela peut aussi être une arme à double tranchant. Fernàndez met en garde contre les dangers d’une promotion uniquement axée sur l’image, sans refléter la réalité du lieu : « Nous ne voulons pas survendre pour vendre. »
La clé, selon elle, est d’attirer un tourisme respectueux, qui apprécie ce qui est là, sans contribuer à la surfréquentation. « Au Priorat, nous voulons continuer à profiter de nos coins en petit comité », dit-elle. Heureusement, l’orographie et les routes de la région rendent une massification rapide difficile, mais une gestion attentive est nécessaire pour préserver cet équilibre.
Un tourisme régulé et équilibré
L’un des grands sujets de débat est la croissance des hébergements touristiques, notamment des appartements. Dans certaines zones, notamment proches des sites d’escalade, cela a entraîné des problèmes de capacité d’accueil.
L’augmentation incontrôlée des appartements touristiques peut nuire tant aux professionnels du secteur qu’aux habitants. Tous les hébergements n’offrent pas les mêmes services ni ne respectent les mêmes normes, et l’absence de régulation crée des inégalités. En outre, cela a un impact direct sur le marché locatif local, rendant l’accès au logement plus difficile pour les résidents.
Fernàndez plaide pour un renforcement de la régulation, afin de garantir que tous paient la taxe touristique et que les bénéfices du tourisme soient réinvestis dans le territoire. « Nous ne voulons pas en arriver au point où le tourisme ne serait plus le bienvenu. »
La Foire du Vin de Falset : un événement phare avec 30 ans d’histoire
L’un des grands événements de l’année est la Foire du Vin de Falset, qui fête cette année son trentième anniversaire. Bien qu’elle porte le nom de la capitale du départe ent, elle représente en réalité toute la région et ses deux appellations d’origine : DOQ Priorat et DO Montsant.
Chaque année, elle attire jusqu’à 30 000 visiteurs. Malgré ces chiffres, Fernàndez assure qu’il n’y a pas de problème de surpopulation, car beaucoup de visiteurs préfèrent venir avant ou après la foire pour éviter les foules. De plus, la foire est une excellente occasion de découvrir des producteurs et de commencer une relation avec le Priorat, qui se traduit souvent par des visites futures.
L’astrotourisme : le Priorat sous les étoiles
L’un des domaines les plus prometteurs est l’astrotourisme. Le Priorat possède l’un des ciels les plus purs du sud de l’Europe, et des certifications comme la « Réserve Starlight » sont en cours de mise en place pour réguler l’éclairage et garantir la visibilité des étoiles.
De plus en plus de caves et d’hébergements combinent œnotourisme et observation astronomique. L’éclipse solaire prévue pour 2026 promet d’être un moment clé, et la région s’y prépare déjà activement.
Fernàndez insiste sur le fait que l’objectif n’est pas que les gens viennent uniquement voir l’éclipse et repartent aussitôt, mais qu’ils découvrent tout ce que le Priorat peut offrir avant et après. C’est un exemple de tourisme régénératif : des visiteurs qui apportent de la valeur, et ne font pas que consommer.
Le rôle du Parc naturel des Montagnes de Prades
La création de ce parc est un autre pari pour structurer et valoriser le territoire. Il contribue non seulement à préserver l’environnement, mais il est aussi un outil de déseasonnalisation du tourisme et d’attractivité pour de nouveaux publics, comme les familles ou les amateurs de culture.
Les parcs entretiennent les sentiers, régulent les activités et permettent au paysage de rester un atout à long terme. Ils sont également essentiels pour éviter les effets négatifs d’événements sportifs ou touristiques mal encadrés.
Courses, vélos et événements : quand le tourisme ne fait que passer
Le boom du trail running et des courses de montagne a également touché le Priorat. Mais tous les événements ne laissent pas la même empreinte. Certains posent des problèmes logistiques, impactent les hébergements locaux ou laissent des déchets dans la nature.
C’est pourquoi, selon Priorat Enoturisme, toute activité doit être bien coordonnée avec le territoire. Si c’est fait avec soin, cela peut être un moteur de promotion. Mais si c’est organisé de l’extérieur, sans prendre en compte les particularités locales, cela peut être plus nuisible qu’utile.
Conclusion : croître, oui – mais avec bon sens
Le Priorat vit un moment de grande visibilité. Avec des vins reconnus à l’international, des paysages spectaculaires, des activités comme l’escalade, l’astronomie ou les foires, il y a de nombreuses raisons d’attirer des visiteurs du monde entier.
Mais la clé réside dans la gestion. Il faut protéger ce qui rend cette région si spéciale. Maintenir un accueil chaleureux, un paysage soigné, et un équilibre entre visiteurs et habitants. En somme, faire du tourisme un allié du territoire, et non un problème. Et comme le dit si bien Sara Fernàndez : que chacun puisse profiter du Priorat “tel qu’il l’imagine”.
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